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O sonhador de Alfama
O sonhador de Alfama


La route du bonheur a été longue, sinueuse, tordue, épineuse, raide pour tout dire. J'écris cela, attablé dans un tasca populeuse, O Sonhador de Alfama, près du Largo de São Miguel. Par la fenêtre, je vois passer un troupeau de nonnes gloussantes, encadrées par des moines en bure marron, en direction de la Cathédrale de Sé. L'odeur des sardines grillées, qui envahit à cette heure le labyrinthe ombragé des ruelles d'Alfama, me remplit l'estomac d'émotions. Et Teresa m'attend, plongée dans un livre, à quelques pas d'ici. La vie est simple, maintenant. Tout était différent, voilà cinq ans.

J'étais en fuite. Je me cachais, dans les tripes accueillantes d'une métropole européenne. Je n'avais presque pas d'argent, personne à qui me fier, encore moins à aimer. Je m'étais construit une petite réputation d'informateur, un petit rat qui vendait contre espèces sonnantes les racontars du milieu, et qui, sinon, savait la boucler. Une nuit, des types que je connaissais s'étaient mis à parler d'un coup qui avait foiré. Les braqueurs s'étaient tirés avec plusieurs sacs plein de papier, mais pas du papier monnaie, ni des obligations, pas même des billets de loterie. Des tickets pour la Route du Bonheur. Un million pièce, écrit en caractères gras et souriants. Ça ressemblait à des trucs de gosse, sauf que personne ne trimballait des trucs de gosse en fourgon blindé protégé par des gardes en Kevlar. Les voleurs conservèrent les tickets, au cas où, deux sacs chacun. Et moururent, de mort non naturelle, provoquée par l'utilisation non conforme d'un pic à glace. Tous les sacs avaient été récupérés par leurs propriétaires. Tous, sauf un, qui était resté caché sous une baignoire, pas très loin du bar où cette histoire m'était racontée. Et d'ailleurs, puisque j'aimais tant les histoires, on m'offrait d'aller voir le sac. C'était un sac de poisse, mais de la poisse de luxe, un milliard au bas mot. Je dis OK, bien conscient du piège tendu, dans lequel je jouais le rôle d'appât pour pic à glace. J'avais rendez-vous trois heures plus tard, que j'occupai à interroger par la bande tous les autres rats, sans succès. Personne ne connaissait la Route du Bonheur. Le sac