Nous eûmes, un temps, nos secrets.
Des secrets magnifiques de rendez-vous tabous et de sourires cachés.
Des secrets étriqués de mensonges, de traîtrises et de vols impunis.
Des secrets ténébreux de blessures infligées.
Des secrets dangereux pour déchaîner l'enfer.
Les secrets faisaient partie de nous. Les secrets nous définissaient. Les secrets nous rendaient différents des autres. Les secrets nous aidaient à construire des empires.
Un jour, nous fûmes séduits. Une créature splendide vint nous dire que nos secrets, tous nos secrets, étaient les siens. Elle nous dit qu'elle ne nous aimerait qu'en connaissance de cause. Si seulement nous lui donnions les clés. Elle dit presque S'il vous plait.
Mais quel sens avaient nos secrets après tout ? Nous n'en faisions pas commerce ; nous les laissions à la cave prendre l'humidité. Il nous arrivait de les oublier. Rien de cela n'était arrivé. Nos morts vivaient très loin d'ici. Nos mensonges, tout bien considéré, étaient des vérités. Les marchandises volées avaient été payées au prix fort. Et nous n'avions jamais couché avec cette femme, ou cet homme. Non, vraiment ? Vraiment.
C'est avec joie que nous lui donnâmes les clés. Elle les tenait maintenant dans ses mains délicates, jouant avec l'anneau qui les tenait ensemble, les faisant sonner et tintinnabuler. Elle nous dit qu'elle ouvrirait ces portes, une par une, et jetterait un coup d'?il. Elle se moquerait des nos amours dérisoires. Elle ferait chanter les voleurs. Elle aurait pitié des menteurs. Tant de pouvoir dans ces petites clés. Parce que nous étions dépossédés de nos secrets, nous