D'abord, nous ne les vîmes pas. Erreurs d'arrondis dans les feuilles de calcul. Fautes de frapep dans les rapports. Picosecondes perdues dans les horloges atomiques. Un battement de coeur en moins sur un électrocardiogramme. Deux centimes de perdus sur une facture. Des pixels morts sur un écran. Quelques mètres gagnés sur une orbite planétaire. Des notes en plus dans une symphonie. Personne ne remarqua rien, sauf certains astronomes, des auditeurs d'assurance qualité et des comptables méticuleux, mais, s'ils notèrent dans leurs comptes rendus ces légères augmentations dans les taux d'anomalies, ils n'en perçurent pas le caractère fondamentalement structurel et volontaire.
Il ne s'agissait pas d'erreurs aléatoires causées par les incertitudes quantiques et autres mouvements browniens.
Il s'agissait de mensonges. Délibérés. Malveillants.
Et cela empira.
Les fautes de frappe se muèrent en dyslexie, la dyslexie devint poésie hermétique. Les mots importants furent changés dans les textes, transformant la moindre notice d'utilisation en assistance au suicide. Les miroirs, fidèles miroirs, se mirent à refléter des objets absents, des couleurs fausses, des formes inexactes, rendant le beau hideux et le hideux abominable. Les étoiles dévièrent de leurs trajectoires, explosant en supernova avant leur date de péremption. Les pixels morts revinrent à la vie, et se mirent à danser.
Les astronomes écrivirent des articles, les gestionnaires d'assurance-qualité furent limogés, et les comptables trouvèrent de nouvelles astuces pour expliquer l'argent manquant.
Et pourtout nous ne