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La partie d'échecs
La partie d'échecs


Création réalisée en 2001

Pose de la première pierre

"Forteresse" : les sujets littéraux comme celui-là sont une invitation à la banalité, car toute interprétation un tant soit peu conceptuelle du thème peut vite être perçue comme hors-sujet. L'inspiration est difficile à venir, surtout quand on ne trouve pas le sujet passionnant... Je n'avais donc pas prévu de participer, mais au vu de certaines images en cours de réalisation montrées ça et là dans les forums, je décidai malgré tout de concourir - esprit de compétition oblige - ... et de jouer le jeu aussi littéralement que possible. Puisque tout le monde, à l'exception de quelques courageux, se mettrait à construire des châteaux, j'en ferais un aussi ! Un vrai château de carte postale, bien reconnaissable, avec juste le chouïa de subversion habituel. Il y avait quelques petits défis à relever, des choses que je n'avais jamais faites : une construction en plein-air, en pierre vieillie, éclairée par un soleil radieux. Cela impliquait de la radiosité, beaucoup de modélisation en CSG, et des photos de référence. Comme j'étais déjà en retard (fin mars), il fallait faire au plus vite. Je récupérai donc des photos de Caracassonne, la plus vieille forteresse d'Europe, que j'avais visitée en 1986 en compagnie d'étudiants africains et chinois, et je me mis au travail, sans attendre d'avoir une vraie idée... qui viendrait bien plus tard.

La première étape était de prendre les bonnes mesures. Les différentes longueurs, hauteurs et largeurs nécessaires à l'établissement des plans furent déduites de mes propres photographies de l'endroit. Mes amis chinois, qui avaient gentiment posé sur les photos, me donnaient l'échelle ! Après cela, ce n'était plus qu'une affaire de patience. Le lecteur intéressé par Carcassonne peut consulter le diaporama ici (qui n'est pas de moi, attention) et particulièrement l'image 15, qui montre les mêmes bâtiments que ceux de mon image, mais vus sous un autre angle. Après quelques soirées de CSG passablement barbantes, j'obtins ceci :

Dans le test ci-dessus, la tour est faite de briques individuelles : j'avais au départ décidé de construire tous les murs de cette façon, comme cela avait été le cas pour la voûte des "Prisonniers". Cependant, les gros plans ne fonctionnaient pas bien, et je finis par utiliser d'autres techniques. La principale consista à plaquer sur les boîtes formant le bâti principal des height fields générés par POV-Ray à partir d'un motif brick complexe et turbulent. Pour la tour carrée et les buildings, les height fields furent passés à une macro chargée de les plier en deux pour obtenir des angles arrondis. Pour les deux tours rondes, l'image d'un height field fut utilisée comme pigment pour "déplacer" la surface d'une isosurface cylindrique. Pour créer les textures correspondantes, les height fields furent plaqués sur des rendus orthographiques des murs et colorés à la main. Pour finir, les trainées sombres (huile bouillante ???) furent ajoutées avec un gradient procédural. Le résultat n'est dans aucun cas 100% satisfaisant.

Les toits des tours furent construits tuile après tuile. Pour le toit conique, le truc consiste à défnir un profil (par fonction ou par spline) et à faire tourner les tuiles autour de l'axe y. Pour les toits carrés, une technique un peu plus compliquée fut employée. Le toit d'ardoise du bâtiment du fond est un simple polygone texturé avec une variante de la texture de brique de Jeff Lee. Des isosurfaces furent utilisées pour les créneaux et les marches (superellipsoïdes "déplacés" avec un motif brick turbulent), ainsi que les grilles des fenêtres (fonction mesh1).

La tour prend garde !

Il y avait bien une forteresse, mais pas de concept ! Il fallait forcément des soldats, grâce au Medieval Knight de DAZ. Des soldats trop occupés pour faire attention à ce qui se passait autour d'eux...

Mais à quelle sorte d'ennemi devaient-ils être confrontés ? Sûrement pas à d'autres soldats : trop petits. Ni à un dragon : trop cliché. Ni à un géant façon Gargantua ou Pantagruel : il aurait bouché le ciel. Une main géante ? L'idée paraissait meilleure : une main était à la fois reconnaissable, active et elle occuperait dans l'image une taille à la fois respectable mais pas envahissante. J'amputai donc Michael d'une de ses mains haute-résolution et je lui fis pousser du doigt la tour carrée. Pour les soldats, le jeu d'échecs semblait l'occupation la plus logique, puisque la main dans le ciel y jouait déjà à sa façon. L'échiquier fut importé de l'"Inondation" (avec sa partie en cours). Je construisis une table simple et une paire de tabourets, et voilà trois soldats innocents absorbés dans leur jeu virtuel. J'envisageai d'ajouter des accessoires, boucliers, chevaux ou tonneaux, mais j'y renonçai après quelques tests. La version 6 ressemblait à ceci :

J'avais des sentiments mitigés sur le résultat. L'effet était bien là, mais l'objet rose dans le ciel était artistiquement très perturbant. Il ruinait la carte postale ! Dans une image plus conceptuelle, pourquoi pas, mais là... Je poursuivai malgré tout, beaucoup restant à faire. Je fis le rendu d'une vue aérienne orthographique de la forteresse et je peignai les parties rocheuses pour en faire un height-field destiné au ravin sur la gauche. Quelques arbres 3DS d'origine inconnue furent récupérés dans mes répertoires de modèles, et je téléchargeai des carrés d'herbe depuis 3D Plants. Les arbres et l'herbe furent disposés au hasard en utilisant la fonction trace() en deux boucles séparées. Une troisième boucle planta des rochers faits avec des isosurfaces.

Une autre question concernait le ciel et l'éclairement. Jusqu'à présent, tous les tests avaient été faits avec un ciel légèrement couvert qui, du fait de la radiosité, donnait un aspect doux, presque peint, à l'image, trop doux en fait. Je voulais que l'image "claque" davantage. Elle était supposée se dérouler en juin, un dimanche, tôt dans l'après-midi. Je changeai donc les couleurs, utilisant un bleu vif et une image Terragen en arrière-plan. Je réglai Terragen avec les mêmes paramètres de lumière et de point de vue que dans la scène POV-Ray. En fait, ce même fond aurait pû être fait avec des nuages bozo turbulents, un brouillard de sol et un height-field, mais Terragen est plus simple à utiliser... Cela prit quelques heures malgré tout, car le test et le rendu d'images Terragen de grande taille n'est pas si rapide.

Restait le probème de la main. Non seulement la solution actuelle était décevante et jurait avec le reste, mais les gros plans en montraient clairement les limites : haute résolution ou pas, la main de Michael trahissait de façon peu sympathique son origine informatique, avec des angles bizarres et des ombres inappropriées. La texture était également insuffisante : la main semblait faite de plâtre ou de plastique. Je testai le skin shader disponible dans le patch Povman de Vahur Krouverk. Le résultat était intéressant, mais un peu excessif, comme on peut le voir dans la version 8 ci-dessous :

Je testai beaucoup d'autres idées : textures de briques, de rocher, métalliques, rayons X (grâce encore à Povman), nuageuses. Aucune ne donnait de meilleurs résultats. Je commençai à peindre une map plus grande et plus détaillée, mais cette aventure parut rapidement au-delà de mes capacités techniques. Enfin, je convertis la main au format PCM, en utilisant l'utilitaire Meshcomp de Warp et les macros associées de gestion de mesh de Chris Colefax. J'extrayai les sommets et les normales du mesh, et je plaçai des objets dessus. J'essayai différentes solutions (rochers, briques...) jusqu'à ce que je trouve l'idée des oiseaux, plus ou moins empruntée au roman de Stephen King "The Dark Half". Je récupérai les 6 corbeaux différents (modèle original de Sharkey) que j'avais utilisés pour "L'épouvantail" et j'en disposai 500 sur le sommets de la main (en fait sur l'axe sommet + normal), brouillant l'effet avec de l'aléatoire. Et voilà, c'était loin d'être parfait, mais cela semblait plus naturel que tout ce que j'avais tenté auparavant dans cette image.

Enfin, je rajoutai un corbeau pour espionner les soldats, et pour célébrer la victoire sur cette image difficile, je hissai un drapeau fait avec Clothray, le patch de simulation de tissu créé par Christophe Bouffartigue et inclus dans Povman.

La version 13 ci-dessous était la version définitive... jusqu'à ce que quelqu'un me dise que la main ne ressemblait pas du tout à une main.

Je refis donc un nuage plus "manuel" et redressai la tour pour équilibrer l'effet.

La version finale prit un jour environ de rendu, et une version en 2400 x 3200 fut rendue beaucoup plus tard.

Une animation de l'image est disponible ici (585 ko, 100 images). Elle montre très bien l'artificialité de la mise en scène, qui n'est faite que pour un seul point de vue.

Remarque post-11 septembre 2001 : cette image a été réalisée en avril 2001, soit plusieurs mois avant les évènements. Toute décodage symbolique a posteriori serait donc illusoire, même si les éléments sont troublants (les deux tours, l'attaque aérienne de la tour par une nuée volante, les gardes inattentifs et absorbés ailleurs, l'oiseau ennemi déjà dans les murs).